France républicaine

Le savoir est une arme qu'on peut toujours charger un peu plus.


Sur les fausses légendes et les faux miracles que les hommes ajoutent aux religions. Par Voltaire. 


S’il se trouvait quelqu’un assez dépourvu de bonne foi, ou assez fanatique, pour me dire ici : Pourquoi venez-vous développer nos erreurs et nos fautes ? pourquoi détruire nos faux miracles et nos fausses légendes ? Elles sont l’aliment de la piété de plusieurs personnes ; il y a des erreurs nécessaires ; n’arrachez pas du corps un ulcère invétéré qui entraînerait avec lui la destruction du corps : voici ce que je lui répondrais. Tous ces faux miracles par lesquels vous ébranlez la foi qu’on doit aux véritables, toutes ces légendes absurdes que vous ajoutez aux vérités de l’Évangile, éteignent la religion dans les cœurs ; trop de personnes qui veulent s’instruire, et qui n’ont pas le temps de s’instruire assez, disent : Les maîtres de ma religion m’ont trompé, il n’y a donc point de religion ; il vaut mieux se jeter dans les bras de la nature que dans ceux de l’erreur ; j’aime mieux dépendre de la loi naturelle que des inventions des hommes. D’autres ont le malheur d’aller encore plus loin : ils voient que  l’imposture leur a mis un frein, et ils ne veulent pas même du frein de la vérité, ils penchent vers l’athéisme ; on devient dépravé parce que d’autres ont été fourbes et cruels. Voilà certainement les conséquences de toutes les fraudes pieuses et de toutes les superstitions.

Voltaire, traité sur la tolérance.

Présentation du livre dont est issu cet extrait, « le Traité sur la tolérence » de Voltaire: